Commune de El Marsa
Avec l'apport de Claude SUIRE
Histoire
Créé le 11 octobre 1900.
Village de la côte, à une quarantaine de kilomètres à l’ouest de Ténès,
sur la route de Mostaganem, entre Pointe-Rouge
et Le Guelta.
En arabe : EL MARSA
Photos
Vues générales
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le Sport
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Situation géographique et plan
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Récits
EL MARSA (le port) Monographie par Claude SUIRE Au
départ de Ténès, en direction de Mostaganem, la route suit le
rivage, puis devient tortueuse dans une région sauvage et mouvementée.
Tellement mouvementée, que dans les années 54, suite à un glissement
de terrain des tronçons de route de plusieurs dizaines voir plusieurs
centaines de mètres ont glissé vers la mer près de Pointe Rouge
au lieu-dit Ben Toumi . On laisse
Pointe Rouge, petit village au bord de mer, pour arriver à Tarzout.
Un croisement , une route à gauche enfin plutôt un chemin carrossable
par beau temps qui conduit jusqu'à Cavaignac. Près du croisement
sous les arbres la ferme Tourrenc, ancienne ferme Reclus habitée
par la famille Sanchez. En reprenant
la nationale 11 on saute l'Oued Tarzout qui étale ses eaux
turquoises avant de se jeter dans la Méditerranée. Cette petite
rivière jamais à sec, était le lieu privilégié pour la chasse
au gibier d'eau. La route
serpente un peu avant d'arriver à la ferme Campillo habitée par
la famille Anton. Quelques
kilomètres plus loin, c'est Boukfilène sur la gauche en bordure
de la route, la maison cantonnière. A 7 kilomètres
d'El Marsa, à la sortie d'un ravin toujours sur la gauche de la
route, la ferme Leconte . Le fils Pierrot était l'instituteur
du village. Une grande
ligne droite, un chemin qui descend vers la mer, voilà la ferme
Arnaud. Le fils Louis a été gardien au phare de Colombi. La route
continue, sur la gauche, en retrait, cachée dans une jolie forêt
de pins d'Alep, la maison forestière des Ouleds Boufrid. Monsieur
Rocchi, dernier garde forestier à y avoir séjourné, avait remplacé
Monsieur Vescovali. Un croisement,
la route descend vers la mer et au bout, le splendide phare de
Colombi. Devant le phare, en tournant à droite un chemin parallèle
à la mer conduit à la ferme Cotinaud. Retour sur
la RN 11 on arrive à Sidi Boukoufa à 6 km d'El Marsa, au bord
de la route, la ferme Régnier. Jacques, le propriétaire était
maire d'El Marsa . On reprend
la route nationale 11, direction Mostaganem à quelques kilomètres
apparaît sur la droite un petit cimetière puis, sur une corniche,
des maisons : c’est El Marsa ! En quittant El Marsa, en direction de Mostaganem , juste à
la sortie du village, après le pont, qui enjambe l'Oued Mellah,
la ferme Richermaud. Ma mère venait y traire sa vache tous les
soirs, quand le troupeau rentrait des champs. Un accord tacite
avec le berger nous assurait le lait nécessaire pour la maison
« Tu gardes ma vache, je prends son lait et toi son veau » Un accord
du même genre avec un autre berger « Je te donne deux chèvres,
tu gardes le lait, tu me donnes tous les ans un cabri » Ainsi allait
la vie, la parole suffisait : pas besoin de papiers n’y d’acte
notarié chacun y trouvait son compte, tout le monde était content. A 3 km du
village, on traverse l’oued Maceur sur un pont submersible puis
la route monte vers la ferme André et descend dans des forêts
magnifiques, c’est là que nous allions faire la cueillette des
champignons. Le dimanche matin, nous avions parfois la chance
de croiser le marchand de fruits qui descendait au marché du village
on en profitait pour faire la provision de belles oranges gorgées
de jus et de soleil. La route
continue, franchit le « pont de la mort » qui enjambe
un ravin très profond. Encore quelques kilomètres et voilà le
village du Guelta. Laissant
la route de Paul Robert sur la gauche, la route traverse le village.
Sur la droite, la gendarmerie, un peu plus bas, l'épicerie et
juste avant la cave coopérative un joli bâtiment c'est la mairie,
encadrée par la poste et l'école Tout le village
est construit au Nord de la route, les rues tracées au cordeau
s'étirent vers la plage de sable fin, elles sont toutes bordées
de magnifiques palmiers. Dans le centre du village, le bar. En continuant
la route nationale 11, on gravit les contreforts du cap Maghroua.
Puis par une descente rapide, on longe le rivage derrière un cordon
de dunes, c’est la plage des Achacha. Une borne
sur la route, marque la limite des départements d’Alger et d’Oran. Déjà trop
loin. Retour au village d’El Marsa. (Traduction en Français :
« Le Port ») C'est le 5 mars 1896 qu'est demandée la création du centre
d'El.Marsa dans la commune Mixte de Ténès, arrondissement d’Orléansville
département d’Alger. La commission chargée de l'étude du projet, propose de former
10 concessions agricoles de 30 hectares chacune et de réserver
20 hectares pour des lots industriels. Dépenses à prévoir pour la réalisation 145.400 francs: - Acquisition des terres 35.900 - Rampe d'accès
à la mer 3.000 - Travaux d'installation 4.500 - Aménagement de la darse 25.000 - Alimentation en eau 25.000 - Réservoir 7.000 - Plantations 5.000 - Bâtiments communaux
30.000 - Chemins ruraux 10.000 Le 23 juin 1897 la décision de la création du centre d’El Marsa
est arrêtée. Le 5 juillet 1899 le Préfet procède à l’accomplissement des
formalités préalables à l’expropriation pour cause d’utilité publique
d’environ 328 hectares de terrains compris dans le périmètre de
ce centre. Le 19 juillet 1900, le Préfet d’Alger annonce l’ouverture de
l’enquête réglementaire, procède à l’affichage et à la publication
dans le journal le Mobacher Le 11 octobre 1900, le gouverneur général de l’Algérie autorise
la création du hameau d’El Marsa. Et pour ce, prononce l’expropriation
d’urgence des terrains reconnus d’utilité publique pour la création
du centre. Le premier obstacle à la construction du hameaux, se sont les
deux tombes édifiées au bord de la route à l'emplacement prévu
pour l'implantation du village. Dans l'une le corps d'un homme de type européen noyé, que la
mer avait rejeté sur la côte. Dans l'autre le corps d'un italien qui avait péri dans un incendie
qui avait ravagé la région et que ses compatriotes avaient enseveli. Les traces de ces deux sépultures ont été totalement effacées
après que les deux corps aient été transférés sur le lot numéro
13 de 52 ares 50 centiares qui avait était réservé pour la création
du cimetière européen. Le mur d'enceinte du cimetière n'a été
édifié qu'en août 1922 par le service des travaux de la colonisation
suite à la demande express des habitants d'El Marsa. Le 14 avril 1905, un périmètre complémentaire de 462 hectares
de terrains est de nouveau exproprié pour agrandir le centre. Le 6 octobre 1906, les indigènes qui étaient propriétaires
des terrains expropriés, ayant tous été désintéressés soit en
argent, soit en nature, l’Administrateur de la commune Mixte de
Ténès met en location aux enchères publiques les terrains affectés
au centre d’El Marsa. La création du village peut être établie en 1909, la population
comptait alors 32 européens et 17 indigènes. Ses proportions sont
toujours restées à peu près identiques sauf pendant la guerre
de 1954, quand les musulmans qui habitaient dans les montagnes
ont été regroupés et logés par mesure de sécurité aux abords du
village. Le centre d’El Marsa se trouve sur le littoral entre Ténès
et Mostaganem, à 250 km d’Alger. sa longitude est de 1° 26 Ouest,
sa latitude de 30° 30’ Nord Petit hameau
traversé par la route nationale 11 qui est la rue principale du
village, une rue parallèle en terre battue au Sud, un chemin en front de mer sur la moitié Est du village et 4 rues transversales orientées Nord Sud . Adossé à
la montagne du Dahra au Sud, encadré à l’Est et à l’Ouest par
deux profonds ravins L'Oued Hadj et l'Oued Mellah enjambés par
deux ponts, le village s’ouvre au Nord sur la Méditerranée. Un chemin
permet l’accès à la plage et à l’embarcadère. Voilà tout
le village. Le territoire du hameau s’étend sur 981 ha 22 a. Il se compose,
d’un plateau situé à l’altitude moyenne de 40 mètres et d’un versant
en pente relativement douce qui atteint 120 mètres d’altitude.
L’altitude moyenne du périmètre est d’environ 60 mètres. Le climat maritime très tempéré assure une très bonne salubrité
la situation sanitaire y a toujours été excellente. Le village est desservi par la route nationale 11 d’Alger à
Mostaganem. Les localités voisines en direction d’Alger sont :
Pointe Rouge à 22 km, Cavaignac
32 km par route nationale jusqu’à Tarzout, et chemin vicinal carrossable
par beau temps, Ténès à 45 km. En direction de Mostaganem : le village du Guelta à 9
km. En 1912, la Poste la plus proche se trouve à Cavaignac. Un
facteur dessert le village 3 fois par semaine. Pour le Télégraphe
et le Téléphone il faut aller à Ténès. Un service de transport est assuré entre Ténès et El Marsa
. Courrier régulier 3 fois par semaine aller et retour. Départ
de Ténès les mardi, jeudi et samedi ; d’El Marsa, mercredi,
vendredi, dimanche, prix du voyage : 2,50 fr de l’époque
par personne . La gare la plus proche se trouve à Orléansville, à 99 km. La
ligne Orléansville Ténès est en construction. Le port le plus proche c’est Ténès. La création d'un abri maritime
à El Marsa à été envisagée par décision gouvernementale le 23
mai 1900. La dépense prévue était alors de l'ordre de 40 000 francs. Une première commission chargée de l'étude du projet préconise
que la construction du port soit retardée, qu'il faut attendre
la construction du chemin descendant de Rabelais au travers du
Dahra, pour voir où aboutira cette route afin d’y construire le
port au plus près. Le 28 juillet 1903 une deuxième commission, au contraire, estime
que la construction du port est d'une importance stratégique et
en demande la construction rapide. La colonisation prévoyait en effet la construction de nouveaux
centres agricoles dans la région de Rabelais, l'écoulement des
productions agricoles et industrielles de ces centres devait pouvoir
être assuré par voie maritime. La situation géographique d'El Marsa avec sa crique déjà bien
abritée des vents d'Est pourrait être aménagée à moindre frais
pour se protéger des vents d'ouest. En cas de guerre ou de révolte un débarquement pourrait avoir
lieu dans ce port. La Marine Nationale pourrait y faire accoster ses navires et
serait doublement intéressée puisqu'elle vient de faire édifier
en 1898 sur le mamelon de Sidi Boukoufa à 6 km du village au dessus
de la propriété Régnier un sémaphore et poste optique. La décision de l'aménagement de l'abri naturel du port d'El
Marsa est prise le 20 avril 1904. Un débarcadère a été construit au village il pourra accueillir
les vapeurs côtiers. Le projet de construction du chemin d'accès au débarcadère
a été présenté le 9 janvier 1912, et approuvé le 30 du même mois.
Il a été réalisé par Monsieur Longo Julien entrepreneur à Orléansville
pour la somme de 11 356,94 francs Le défrichement des terres a été relativement facile en général
et peu élevé du fait que le palmier nain était peu répandu et
que dans les endroits où la broussaille était épaisse, la valeur
en bois compensait les frais engagés. On comptait 8 exploitations privées (étendue moyenne de 200
hectares) réparties le long de la route nationale 11 sur 20 km
de distance. El Marsa est situé à l’extrémité ouest de cette ligne
de fermes. L’ensemble des exploitations qui étaient prospères
comprenait environ 70 hectares de vigne, 250 hectares de céréales,
30 hectares de petites cultures diverses et 1 200 à 1 300 hectares
de terrain de parcours pour l’élevage ( chèvres, moutons et bovins).
Le rendement de la vigne n’était pas supérieur à 30 hectolitres
à l’hectare sauf en terres fumées et irrigables. (Les terres situées
sur la rive gauche de l’oued Maceur contiennent plus d’humus)
Le rendement en céréales variait de 8 à 15 quintaux à l’hectare
pour le blé et de 12 à 28 pour les fèves. L’amendement et le travail
des terres a fait progresser de manière considérable les rendements.. L'eau à été le problème
principal du centre d'El Marsa. Le 26 août 1905, l'administration
approuve le marché pour le creusement d'un puits près de la maison
de la commune mixte, mais les résultats sont décevants. Un suintement a été détecté dans la crique près des docks de
Monsieur Targe. L'entreprise chargée de la construction du port
a capté cette source et construit un abreuvoir
afin de récupérer l'eau nécessaire pour ses travaux .Un
autre suintement à 200 m à l'Est du premier, au pied de la falaise,
d'un débit encore plus faible. A 2 km au Nord Est, on trouve l'Ain Boukoufa. Cette source
a été aménagée par le Génie militaire. Cet endroit a gardé le
nom de Fontaine du Génie nous y allions souvent en famille passer
la journée à la mer à l'ombre des pins. Le débit de cette source
était également très faible. Ce sont à peu près les seuls points d'eau trouvés sur le territoire.
Leur faible débit et leur émergence en contrebas de l'emplacement
du village nécessitait une mise de fonds trop importante par rapport
au rendement escompté. Ils n'ont pas été retenus pour l'approvisionnement
du village. La solution est venu de l'Aïn Mazouza, source émergeant dans
le lit de l’oued Maceur. L'eau était amenée dans une conduite
en fonte par gravitation dans un réservoir de 60 m 3 établi au
droit du village au bord de la mer, près du débarcadère, débit
14 m 3 par jour. De là, elle était refoulée par un groupe moteur à pétrole et
pompe centrifuge dans un réservoir de même capacité, placé au
sommet du village. Le 6 octobre 1911 le village a demandé et obtenu l'installation
d'un nouveau moteur à essence avec pompe. Le 10 avril 1920, Monsieur Terrier, colon à El Marsa, propriétaire
de terrains sur les bords de l'Oued Maceur construit un puits
qui ne tarit pas à l'étiage et qui lui assure un débit de 10 litres
à la minute. L'administration propose à Monsieur Terrier d'utiliser son
puits pour l'alimentation en eau du village moyennant un loyer
annuel de 1 000 francs. Monsieur Terrier propose d'amener l'eau au village et de garantir
un débit constant de 10 litres à la minute contre la somme de
10 000 francs par an. L'accord n'est pas intervenu, l'administration jugeant que
le propriétaire faisait de la surenchère. Plus tard, en 1921, une nouvelle conduite d'eau a été construite
un puits ayant été percé, toujours dans le lit de l’oued Maceur,
mais bien plus près de la mer, juste dessous « le mur »
terminal des ballades pédestres du soir, après le dîner, virage
à gauche à angle droit sur la route nationale 11 direction de
Mostaganem à 2 km à la sortie du village. C’était la halte privilégiée
des villageois après le dîner quelques instants de pause et de
discussion sur le mur avant de repartir pour le village (avant
la guerre). Le débit était de 0,33 litres à la seconde soit environ 28
m 3 par jour. C’est peu mais il n’y avait pas d’irrigation en
grand, ni d’utilisation industrielle. Bien que cela ait amélioré l’approvisionnement en eau du village,
il y a toujours eu des restrictions et la distribution d’eau était
réglementée si bien que les robinets ne coulaient pas en permanence. Face au mur de l’autre côté de la route, sur le talus, des
fouilles avaient permis de mettre à jour des vestiges romains :
jarres, monnaies et divers objets ont été trouvés. Le 25 août 1911, un projet d'ouverture des chemins d'exploitation
est présenté, il est approuvé le 14 septembre suivant. Les travaux
peuvent commencer. Le 13 août 1913, le Gouverneur Général accorde les crédits
pour la construction des voies d'accès aux jardins. Les travaux
ont été terminés le 3 mai 1914. Le dimanche, un petit marché Arabe se tenait au village. Des
montagnes descendaient volailles, fruits et légumes. Moutons,
chèvres et cabris tués à la demande fournissaient la viande fraîche.
Une petite épicerie près de la place, tenue par un épicier
Arabe, procurait au village le
ravitaillement de première nécessité. Dans les mêmes bâtiments qui appartenaient à François Soler,
un four permettait au boulanger Roland Lacurie de fournir du bon
pain au village. Hélas le nombre d’habitants de la commune ne
permettait pas un débit suffisant et souvent le pain venait de
Ténès avec le courrier. Pendant la guerre d’Algérie, la présence
de l’armée au village a permis au mitron de rallumer le four. François Soler, propriétaire des bâtiments, exerçait le métier
de coiffeur à Alger et quand il résidait au village il y exerçait
ses talents. Pendant ses absences chacun se débrouillait comme
il pouvait. Pour les courses plus importantes, viande bovine, linge, tissu,
médecin, pharmacie outillage, il fallait se rendre à Ténès ou
à Orléansville. Le bar, lui aussi, a déménagé près de la place, lot n° 5. Avec
son boulodrome, il accueillait à l’heure de l’apéritif les consommateurs
et pour les occasions exceptionnelles toute la population. A l’origine
un hôtel restaurant était installé lot n°1, à l’entrée Est du
village. La mairie a récupéré ce bâtiment qui servait à réunir
la population pour organiser des repas, réunions ou autres festivités. Un bureau de poste a vu le jour dans le lot n° 3. Avec lui,
le téléphone est maintenant arrivé au village. L’électricité aussi, la ligne électrique arrive de Ténès et
relègue dans les placards, lampes à carbure et lampes à pétrole.
Elle ressortiront plus tard, avec les événements, les lignes électriques
et téléphoniques ont souvent été coupées. Derrière la poste une petite chapelle rassemblait les fidèles
pour la messe quand un curé venait à passer au village (environ
une fois par mois). Les enfants du village et des fermes alentour
pouvaient y suivre le catéchisme dispensé par Madame André. C’est
dans les années 54 que fut construit, dans le lot n° 9, une petite
église pour remplacer la petite chapelle un peu exiguë. A la création du village il n’y avait pas d’école au village
seule une école privée à Pointe Rouge pouvait accueillir les enfants. Le 14 octobre 1909, le Préfet établissait un rapport jugeant
que la construction d'une école ne présentait pas un caractère
d'urgence marquée, et d'expliquer que l'éloignement des fermes
sur près de 10 km, justifiait sa décision. Monsieur le préfet
pensait que les colons ne feraient pas le voyage quotidien pour
amener leurs enfants à l'école. L'école était pourtant obligatoire. De plus, les premiers acquéreurs
des propriétés mises en vente avaient pour obligation de construire
sur leurs terrains des bâtiments d'une valeur minimum de 1 500
francs afin de pouvoir loger leurs ouvriers et leur famille. De
surcroît, ces acquéreurs s'engageaient à résider sur leur propriété
pendant une durée de 10 ans sous peine de se voir déchus de leurs
droits. Bien entendu, certains colons n'ont pas voulu laisser leurs
enfants sans éducation et se sont fait représenter sur leur propriété par d'autres familles. Les spéculateurs
eux aussi ont profité de la situation. L'administration s'est vue obligée de sévir: retour sur les
propriétés ou déchéance des droits et restitution des propriétés.
Devant l'urgence, la construction d'une école est acceptée.
Elle sera construite sur la place du village avec une cour et
un préau couvert. A l'étage, un appartement de trois pièces cuisine
pour l’instituteur. Un jardin contigu à la cour permettra aux
enfants de s’initier au jardinage. Le 3 octobre 1922, le service des travaux de colonisation remettait
à la commune mixte de Ténès, les clefs de l'école avec tout le
matériel et mobilier nécessaire. L'opération a coûté 87 893 francs.
Comme tout ce qui est fait dans l'urgence, de nombreuses malfaçons
ont été constatées par la suite, et de nombreux rapports ont fait
état des dégradations précoces sur le bâtiment. Le 18 décembre 1925, il est signalé une fissure importante
sur la façade près de la porte d'entrée du bâtiment. Le 15 mars 1926 un rapport est adressé au préfet relatant la
chute de morceaux de plâtre du plafond dans la salle de classe.
Mais enfin El Marsa avait son école et, en 1962 elle était
toujours debout. Face à la place, de l’autre côté de la route nationale, la
cave coopérative. C'est le 6 mars 1920 que Monsieur Targe, Président du syndicat
de Tarzout comprenant les centres de Pointe Rouge et El Marsa
a fait une demande d'achat des lots urbains 1 et 1 bis et une
partie du lot domanial n° 7 pour la construction de la cave. Certaines fermes possédaient leur propre cave. Malgré tout,
la cave du village connaissait une intense activité pendant la période des vendanges. Les résidus des vendanges étaient entassés derrière la cave
sur un terrain vague, des vols de verdiers, linots, chardonnerets,
et autres passereaux profitaient de cette manne jusqu’à l’arrivée
de l’alambic. C’est là que l’on calait les gluaux qui alimentaient
les volières. Au nord-est du village a été construit le foyer rural, petit
bâtiment de deux étages comprenant deux appartements et au rez-de-chaussée
une salle de cinéma et de spectacle. Derrière le foyer rural, sur la falaise surplombant la mer,
le stade de basket a été inauguré en juillet 1955. L’abreuvoir situé à l’ouest du village, au bord de la nationale,
a été supprimé. Clôturé, un jardin a vu le jour autour du bassin.
Au bout du jardin, près du pont la maison du garde champêtre.
Monsieur Loffrédo, ancien marin et très bon pêcheur a remplacé
Monsieur Combe dans cette fonction. Attenant à cette habitation, une pièce servait de mairie. En
1962 une nouvelle mairie était en construction près de la cave. Un autre abreuvoir dans le centre du village derrière l’école
permettait aux troupeaux de s’abreuver en rentrant des pâtures. A côté du réservoir lot n° 11 Philippe Tracol ouvrier à la
ferme Régnier, obligé de se réfugier au village depuis les événements,
a ouvert un petit atelier de mécanique. De l’autre côté de la route nationale, face à l’église, sur
le lot n° 8, la maison cantonnière, autrefois servait d’habitation
au garde champêtre, occupée par un employé des Ponts et Chaussées,
elle a aussi servi d’habitation à Monsieur Pélican pendant les
événements. A l’ouest du village, entre l’église et le jardin public, la
propriété de mes parents, dans le lot n° 10. Mon père a ouvert
un atelier de forge et charronnage, mécanique, scierie, menuiserie,
et dans la rue derrière lot n° 6, en bordure d’une vigne lui appartenant,
le moulin à farine qui rassemblait toute les semaines les montagnards
descendus au village pour faire moudre leur grain. Les lots 7, 8 , 10 et 11 en location voyaient pousser
lentilles, petits pois, fèves, haricots, pois-chiches et autres
légumes. Un caroubier immense faisait la joie des cochons, des
lapins et des oies. Deux ruches à l’abri des figuiers de barbarie assuraient l’approvisionnement
en miel de la famille. Dans le lot n° 10, un hangar abritait la batteuse dont mon
père assurait la bonne marche tous les ans à l’époque des battages. Face à la maison, au Nord, de l’autre côté de la route n° 11,
un terre-plein, en bout la falaise. Cet endroit que l’on appelait
la roulotte tenait son nom du fait qu’une famille de gitans s’était
arrêtée quelques temps à cet endroit, probablement pour la vue
panoramique sur la mer. C’est de là que ma mère surveillait la baignade. 40 mètres plus bas, la grande bleue avec son petit port, sa
plage, son rocher et ses bateaux. Pas de pêcheurs professionnels, tout au plus 3 ou 4 amateurs,
mais que de poisson ! A l’Est en mer ‘’le rocher aux moules’’, quelques encablures
plus loin, l’île « Colombi » avec ses pigeons, ses langoustes et son veau marin. En octobre 1936, peut-être en prévision des événements à venir,
l'administration a cherché à louer cet îlot afin que personne
ne puisse le revendiquer. C'est Monsieur René Arnaud, colon à
El.Marsa, établi sur la côte juste en face de l'île Colombi, qui
a obtenu la location pour une durée de trois ans, moyennant un
loyer annuel de cinq francs. A l’est de la crique en haut de la plage de galets, à l’ombre
des tamaris, un treuil permettait de tirer les bateaux à terre
quand la mer menaçait. Les oursins : pas besoin de beaucoup se mouiller pour
remplir son panier. La pêche à El Marsa : c’était l’abondance certains pêcheurs
venaient de Mostaganem pour des campagnes de 3 ou 4 jours, pour
caler filets et palangres. Ils savaient bien que le voyage en
bateau en valait la chandelle le poisson partait par la route
du petit port d’El Marsa pour la ville. D’autres pêcheurs venaient de Ténès caler des nasses près de
l’île Colombi pour attraper homards, langoustes et cigales. Mérous, rascasses, badèches, mustelles, murènes, dorades, dindes,
ritcholes faisaient la joie des pêcheurs amateurs. La chasse ouverte toute l’année, pas de société, pas d’assurance,
juste le permis permettait la pratique permanente de ce sport
et l’approvisionnement continu en gibier. La montagne du Dahra, véritable grenier à sangliers déversait
toutes les nuits des hardes de sangliers sur les cultures. Un
véritable désastre pour les musulmans qui cultivaient leurs petits
lopins de terre dans les montagnes et qui venaient solliciter
l’aide des européens pour venir tirer le soir à la tombée de la
nuit sur ces animaux dévastateurs. Mon père en contact permanent au moulin et à la forge avec
les montagnards, était souvent sollicité pour cette chasse à l’affût
ou à l’approche. Quelques fois des battues étaient organisées par les colons
quand les dégâts dans les cultures étaient trop importants. Des
tableaux impressionnants étaient alors réalisés. Lièvres et lapins en nombre important permettaient aux chiens
courants de se faire la voix. Les perdreaux, des compagnies innombrables faisaient la joie
des chasseurs avec chiens d’arrêt. Un territoire qui s’étire sur 20 km le long de la côte, permettait
la pratique de tous les types de chasse dans une nature magnifique
et généreuse. Le 30 mars 1912, l’Administrateur de Ténès déclarait concernant
le village d’El Marsa : « Nous engageons vivement les
colons qui auraient l’intention d’acquérir à El Marsa, de ne pas
se laisser séduire par la situation du hameau situé au bord de
mer. Leur intérêt leur commande de se rendre compte sur place
de la qualité des terres de manière à ne pas avoir de déception
par la suite. Nous estimons que d’une manière générale, le périmètre
de colonisation d’El Marsa est formé par des terres de qualité
médiocre qui réclameront pour leur mise en valeur beaucoup d’énergie,
de bonne volonté avec aussi une certaine mise de fond. » Monsieur l’Administrateur avait certainement raison, mais les
habitants de ce hameau, à force de courage et de persévérance,
ont su déployer l’énergie nécessaire pour faire d’EL Marsa, en
à peine plus d’un demi siècle, un véritable petit paradis où toutes
les communautés vivaient en paix. |
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